Pourquoi la posidonie est-elle encore en danger ?
Malgré les nombreux services qu’elle nous rend, la posidonie est particulièrement menacée par les activités anthropiques. Son déclin est préoccupant et est favorisé par des facteurs “de stress” : aménagements intensifs des côtes, pollution, pratiques de pêche non durables, tourisme mal planifié, invasion d’espèces exotiques, changement climatique, acidification des océans, maladies et évènements météorologiques exceptionnels etc. Tous ces facteurs entraînent la régression des herbiers de posidonie et l’Homme en est grandement responsable puisqu’il est la cause de quasiment 70 % de sa décadence !
D’après les dernières estimations, entre 13 et 50 % des herbiers marins semblent avoir été perdus au cours des 50 dernières années, et durant les 20 prochaines, on pourrait perdre encore 50 % de ceux-ci. La posidonie décline donc à un rythme 100 fois plus élevé qu’elle ne se forme. Une situation inquiétante lorsqu’on sait que c’est une plante à croissance extrêmement lente et à longue durée de vie.
L’un des plus gros impacts humains est l’action mécanique directe des ancres des bateaux sur les prairies sous-marines. En effet, les ancres arrachent les pousses de posidonie, voire des sections de matte, créant des espaces vides dans l’herbier : des intermattes. Cette fragmentation des herbiers peut être irréversible si l’ancrage persiste, détruisant ainsi complètement la prairie de posidonie et créant une cascade de conséquences néfastes pour l’écosystème côtier. Au mouillage, sous l’effet de la houle et du vent, les bateaux bougent et peuvent faire un tour complet autour de l’ancre, labourant ainsi le fond en forme de cercle. Les intermattes favorisent l’implantation d’espèces invasives telle que l’algue Caulerpa taxifolia qui prend la place de la posidonie et altère la repousse de cette dernière.
L’artificialisation des côtes est aussi une grande cause de destruction des herbiers marins. Tout d’abord, la posidonie est une plante sensible à la turbidité de l’eau, c’est-à-dire à sa transparence. Les travaux au bord des côtes engendrent une hyper-sédimentation du substrat, et les rhizomes se retrouvent alors étouffés sous le sable et les sédiments. La luminosité est fortement diminuée et la qualité de la photosynthèse est alors réduite. L’hydrodynamisme local peut aussi être modifié et la matte peut être grandement érodée. Le réensablement des plages affecte également les herbiers de posidonie puisque l’ajout rapide de sédiments entraîne notamment une réduction de la taille des pousses, des changements d’espèces accrochées aux feuilles ou encore une mort prématurée. Le profil des plages est ainsi modifié sur le long terme.
Les fermes aquacoles altèrent la chimie de l’eau et du substrat, entraînant une augmentation du taux de mortalité de la posidonie. En effet, la nourriture donnée aux poissons en excès ainsi que les excréments libèrent une quantité importante de matière organique dans l’eau, conduisant à la prolifération d’algues sur les feuilles de la plante. La photosynthèse se retrouve donc limitée. Ces rejets aquacoles s’accompagnent d’une libération de sulfures dans les racines et une surcharge de sédiments, rendant le milieu toxique et privé d’oxygène. La demande en poissons et fruits de mer étant en hausse, en 20 ans, la quantité de fermes aquacoles en Méditerranée a augmenté de 5 % par an.
Récemment, il a été montré que la crème solaire a aussi des conséquences néfastes sur les rhizomes de la posidonie puisqu’ils accumulent plusieurs composés comme le parabène. Cela est d’ailleurs souvent associé à une diminution de la production de pigments photosynthétiques, une inhibition de la croissance cellulaire, des dommages sur les structures internes, des altérations morphologiques cellulaires ou encore une atteinte à l’activité métabolique.
Une des principales causes du déclin global des herbiers de posidonie est le changement climatique. En effet, l’élévation de la température de la mer a un impact direct sur le posidonie puisqu’elle perdure normalement dans des eaux comprises entre 13 et 28°C. Un autre impact, indirect, du réchauffement climatique est l’activité d’herbivorie de la saupe. Des études ont montré que ce poisson broute les feuilles de manière plus intensive lorsque l’eau devient plus chaude, s’ajoutant aux autres pressions que subit la plante.
Cet ensemble de menaces compromet la croissance de la posidonie ainsi que l’activité photosynthétique de celle-ci. On s’attend à des conséquences négatives dépendantes de la profondeur, ce qui amène à l’idée que les premiers herbiers menacés seront ceux proches de la surface. La reproduction sexuée serait aussi fortement impactée, ce qui poserait un problème de diversité génétique à long terme. Aucun herbier de posidonie n’échappe aux activités anthropiques et aux conditions environnementales changeantes, c’est pourquoi des mesures de conservation doivent absolument être mises en place et respectées pour cette espèce !